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FATIGUÉ ... DE NE RIEN FAIRE ?

 

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Au travail, lorsque l'activité quotidienne nécessite moins de deux heures et que le reste de la journée consiste à combler l'ennui et les heures qui défilent, voici le point de départ de l'ennui chronique au travail.

À partir de ce moment-là, les spécialistes parlent du syndrome de bore-out. Comme Christian Bourion l’explique, il s'agit d' «  un mécanisme de destruction de la personnalité qui intervient par une grande inactivité ».


Mais comment en sommes-nous arrivés à une telle situation ? La raison première est tout simplement une insuffisance de travail. Autrement dit, s’il n’a pas de tâche à effectuer, le salarié ne fait rien. En plus d'un ennui profond, c'est un sentiment d'être inutile qui l'envahit. Ce phénomène touche toutes les branches de métiers mais plus particluièrement les personnes qui exercent des activités dont les tâches sont répétitives et monotones.


Selon une étude réalisée par Ipsosen France, le salaire est pour 49% des salariés leur principale préoccupation, seulement 19% d'entre eux considère que c'est le travail en tant que tel. 

L'importance de l’environnement de travail est également évoqué par les personnes sondées. Autrement dit, si un employé n’a pas de bons rapports avec ses collègues, cela aura un impact direct sur son bien-être au travail. Enfin, le salarié peut avoir commis une erreur de choix de carrière et se retrouver à exercer un métier qui ne lui correspond pas.

L'ensemble de ces situations peut conduire une personne au bore-out.



Depuis 2011, il se penche sur ce sujet qui fâche. Le bore-out syndrom, premier livre sur le phénomène en France, dont il est l'auteur, délivre les dessous d'une pathologie tabou. Le chercheur Christian Bourion s'est intéressé à un phénomène qui toucherait donc plus d'un salarié européen sur trois ! Un phénomène qu'il a découvert par hasard : « Alors que je travaillais sur la face sombre du travail, en l’occurrence le burn-out syndrom, sur mon ordinateur, j’ai fait une faute de frappe. Le programme m’a alors demandé de choisir entre «burn» et «bore»... En France, strictement personne ne parlait ni ne connaissait le concept de bore-out. Curieux d’en savoir plus, j’ai rentré le mot-clé «bore-out» dans la fenêtre de recherche. L’ordinateur n’a trouvé aucune référence française mais sept en allemand. J’ai alors décidé de m’y consacrer ».


Pas assez de travail et toute la journée sur Facebook, une aubaine pour certains, un calvaire pour d'autres. Christian Bourion qualifie ces personnes comme étant une « armée de chômeurs déguisés en travailleurs ». Chômage et travail ne seraient donc plus deux concepts distincts, avec deux réalités différentes, puisqu'une donnée se serait glissée entre les deux : le travail sans activité. Avec la placardisation dans la fonction publique, les 35h et autres RTT, la France se serait dotée « d'un système sans équivalent d’absorption sociale de l'inactivité ». Rencontre.


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         Dans la majorité des cas, lorsque le syndrome de bore-out est évoqué, cela sous-entend que l'épuisement professionnel est dû à un manque de sollicitations. Un sentiment de doute sur la valeur ou le sens du travail accompli s’installe ainsi chez les salariés qui s'ennuient. Ces ressentis entraînent rapidement une remise en question et une perte totale d’intérêt pour le travail réalisé. Le bore-out touche toutes les catégories professionnelles. Si les supérieurs hiérarchiques affirment, très souvent, que les salariés ne souhaitent pas avoir davantage de responsabilités, les intéressés, quant à eux, sont plus de 60% à vouloir être chargés de tâches plus responsabilisantes.  La communication entre les « top-managers » et les salariés semble donc assez compliquée. 

Mais comment en arrive-t-on à une telle remise en question ? Plusieurs causes peuvent aboutir à une telle situation. 


L’absence de travail est la cause la plus répandue. Un rythme de travail ralenti, une activité lassante et redondante, et donc des journées peu rythmées, autant de facteurs qui peuvent mener une personne à un profond ennui professionnel. Par exemple, les agents de sécurité ou les hôtesses d’accueil, ces métiers dans lesquels une personne est immobile, sans réelle interaction avec autrui, et ce, durant de longues heures. 


Il existe également un problème de surqualification des salariés. Ce fléau est aussi l'une des causes d’un ennui professionnel.

Dans cette situation, le salarié occupe une fonction qui ne correspond pas à ses compétences. Autrement dit, lors du recrutement, il existe un écart entre la fiche de poste très théorique dont les missions ont été surévaluées, et la réalité du terrain. Ou bien, les employés embauchent sciemment des personnes dont le potentiel ne correspond pas aux besoins réels de l’entreprise. 


L’isolement, le manque de reconnaissance, et la mise au placard dit « la placardisation » sont également des situations dans lesquelles les salariés sont fréquemment confrontés. Ils se sentent inutiles puisqu’ils ne sont pas reconnus ni par leurs pairs, ni par les clients. L'individu se retrouve dans une situation d’isolement lorsque la cohésion avec ses collègues s’amenuise. Il est alors mis à l’écart. Selon Dominique Lhuillier, psychologue du travail, cette placardisation est dramatique et peut mener à un réel mal-être de la part du salarié et peut parfois même entraîner une importante dépression voire de graves maladies comme des AVC ou des cancers.


Le travail doit répondre à des attentes telles que l’argent, bien sûr, mais aussi à l’épanouissement personnel, l’évolution de carrière et le réseau social. S’il réalise des tâches sans intérêt, qu’il est peu sollicité le salarié sera frustré. De ce fait, cela engendrera un manque d’estime pour sa propre personne.  Il se mettra donc en quête de sens, et s’enfermera dans un cercle vicieux qui conduira à une vraie remise en question. 




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L'ENQUÊTE

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Le 2 mai dernier, au conseil des Prud'hommes de Paris, Frédéric Desnard est la première victime du bore-out en France a avoir décidé de porter plainte contre son employeur.

Il y a dix ans, il est employé en tant que responsable de services généraux dans une entreprise de parfums. Un poste dans lequel il est appelé à contrôler le bon fonctionnement de la logistique de l'entreprise. Au fil des années la situation se détériore, Frédéric Desnard est de moins en moins sollicité pour aider les assistantes de direction, jusqu’à être mis de côté par la hiérarchie. Cette situation l'enferme dans une profonde solitude.

Le travail se fait rare, ses collègues l'ignorent ou ne comprennent pas son désarroi. Frédéric est livré à lui-même et de nombreux problèmes de santé apparaissent : dépression, insomnies jusqu'au jour où il est victime d’un accident de la route dû à une violente crise d'épilepsie. N'étant plus en état d'aller travailler, Frédéric Desnard enchaîne les arrêts maladies. En 2014, il se fait licencier pour « absentéisme prolongé » et choisit d’attaquer son entreprise en justice. Frédéric Desnard espère que la décision de justice qui sera rendue le 27 juillet prochain, fera avancer la question du bore-out en France.

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TÉMOIGNAGE

INTERVENANTS

 Christian Bourion est le premier Français à avoir théorisé le bore-out. Ce professeur a écrit un livre sur ce sujet : Le bore-out syndrome, quand l’ennui au travail rend fou.

 

 Psychologue du travail, Dominique Lhuilier est aussi professeure en psychologie du travail au CNAM et auteure d’un ouvrage sur la placardisation : Placardisés, des exclus dans l’entreprise.

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Christian Bourion 

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Le bore-out semblerait bien être le fait des organisations modernes. Elles sont aujourd’hui des organisations dans lesquelles les différents managements s’entremêlent et où l’individu en devient servant.

La France est donc dans des modèles d’organisation où l’on enferme les gens dans des cadres et où ils deviennent des exécutants. Sans initiative au travail pas de plaisir pour ces personnes qui subissent le système malgré eux. Si l’individu subit le système il cherchera un autre environnement de travail. L'individu trouvera alors des stratégies pour s'investir ailleurs.

Certaines tendances actuelles de l’organisation du travail peuvent favoriser donc le développement du bore-out, comme la multiplication des échelons hiérarchiques ou encore l’éclatement des tâches. Selon une récente étude de l’OVAT (Observatoire de la Vie Au Travail), 58 % des personnes se disent "stressables" au travail. Pire, 60 % d'entre elles affirment tellement stresser que cela les rend dépressives, souffrantes. Depuis dix ans, l'environnement de travail s'est dégradé.

L'individu se retrouve face à des injonctions paradoxales : respecter une foultitude de procédures alors qu'on lui demande de prendre des initiatives. Ce qui exige deux modes de management, celui de la compétence et celui de l'improvisation.


LE MANAGEMENT, UN PROBLEME FRANCAIS ?